La chapelle de Vahl

29/01/2021 0 Par HP57PB38
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La chapelle de la Sainte-Trinité.

Par Paul BASTIEN et Anne ROCH.

Retracer l’histoire d’une chapelle est choses commune. Elles sont fort nombreuses, même dans notre environnement proche. On désigne comme chapelle, un oratoire sans qualification paroissiale précise. Ces chapelles ont souvent des destinations bien différentes. Généralement implantées dans un lieu privé, réservées au culte, nous les trouvons dans un couvent, un séminaire, un château, mais aussi en tant que chapelle sépulcrale dans un cimetière. Nombreuses sont celles édifiées en plein champ. C’est le cas de celle que nous allons évoquer.

La chapelle et ce qu’il en reste

Seul vestige de la chapelle

Les derniers vestiges de la chapelle de la Sainte-Trinité sont visibles sur la route départementale (D24), à l’intersection de la route de Vahl-lès-Faulquemont à Guessling et de la route de Pontpierre (C1). Elle était implantée sur la parcelle cadastrale 57, à droite de la route. L’édifice a totalement disparu, les seuls vestiges sont les deux marronniers jadis plantés devant la chapelle et quelques traces des anciennes fondations. 

La chapelle vers 1955

Le seul témoignage visuel de sa structure est une photographie des années 1958-60.

L’auteur de cette prise de vue avait noté les deux bancs de pierre à l’extérieur, à gauche et à droite de la porte d’entrée. A l’intérieur l’autel de pierre était enseveli sous les gravats et les niches des statues étaient vides.

Plan de situation

                  

Son histoire

Voici son histoire, ou du moins ce que l’on connait.

Au début du XVIIIème siècle, le Sieur Sébastien Turck (1658-1743), né à Vahl et habitant Pontpierre et son épouse Madeleine Wilhelm (1666-1742), font bâtir une chapelle, la « Chapelle de la Sainte Trinité » sur le ban de Vahl. De fait, dans les archives de l’église de Vahl on retrouve un contrat de fondation de messes signé par Sébastien Turck le 31 janvier 1732. Par ce contrat celui-ci s’engage à payer cinq messes par an. Quatre messes basses seront dites en l’église de Vahl et, une messe haute sera célébrée en la chapelle de la Sainte Trinité. On retrouve des traces de recettes concernant ce contrat dans les comptes de l’église de Vahl jusqu’en 1747.

Pour corroborer ces informations, nous notons que, entre 1728 et 1739, une équipe de l’ingénieur géographe Nicolas Naudin, situe une chapelle dédiée à la Sainte Trinité, au croisement des routes de Pontpierre et de Vahl-lès-Faulquemont à Guessling.

Les environs de Vahl., carte de Nicolas NAUDIN

N. Dorvaux, dans son ouvrage « Les anciens Pouillés du Diocèse de Metz », 1902, relève la phrase suivante dans un document de 1749 : « … un particulier a fait construire une chapelle dans la campagne en l’honneur de la Sainte Trinité et a laissé environ 100 écus pour l’entretien et la décoration de cette chapelle. »

Entre 1754 et 1788, on retrouve dans les comptes de l’église de Vahl des écritures de recettes concernant un nouveau contrat de fondation de messes signé le 18 janvier 1751 par les héritiers de Sébastien Turck et Madeleine Wilhelm. Ce contrat stipule qu’une messe chantée qui devait être célébrée dans la chapelle Sainte Trinité est transférée  en l’église de Vahl,  car la chapelle est interdite et que l’on n’y fait plus aucun service. On note aussi que les rentes versées par les héritiers pour la décoration de la chapelle sont converties en messes pour le repos des âmes des fondateurs.

On suppose donc que la chapelle était en mauvais état et devenait dangereuse.

Une carte du géographe Cassini, établie entre 1756 et 1789, indique à cet endroit une chapelle en ruine. Ce qui confirme les informations précédentes.

Dans les archives de la mairie de Vahl, on trouve une liste intitulée : « Souscription ouverte en faveur de bâtir une chapelle sur le ban de Vahl auprès de  Kapel Kritz. Fait le 10 mai 1832. »  Cette liste comporte 45 noms suivis d’un montant, et en bas de page un total de 189,00. Ce lieu-dit se situe près de l’emplacement des vestiges de la chapelle que nous connaissons. Il est mentionné sur le cadastre communal de 1831. Cette souscription est peut-être le point de départ d’un élan pour la construction d’une nouvelle chapelle.

Une monographie anonyme, rédigée en allemand, non datée, découverte aux Archives Départementales de Metz, note qu’une chapelle et un calvaire ont été construits en 1866 lors de l’épidémie de choléra,  pour apaiser la colère divine.

La mémoire populaire nous dit qu’en 1866, une nouvelle chapelle a été construite sur l’emplacement de la chapelle détruite. Selon toute vraisemblance, pour remercier Dieu d’avoir arrêté le fléau de l’épidémie de choléra. Elle garda son nom « Chapelle de la Sainte Trinité ».  C’est un membre de la famille Turck-Maillard qui la fit édifier.

La chapelle n’étant pas consacrée, aucune messe n’y a été dite. Par contre, des processions ont été régulièrement organisées.

La chapelle a subi les outrages et les ravages de la seconde guerre mondiale. En 1939, les soldats français défoncèrent la porte et y installèrent leur campement. Il y eut des saccages. A partir de ce moment la chapelle resta ouverte à tous vents et au pillage. Elle se détériora rapidement.

En 1944, pour freiner l’avance de l’armée américaine, une unité de l’armée allemande en déroute, dynamita le carrefour Vahl/Pontpierre/Guessling à proximité de la chapelle. L’édifice en fut ébranlé et d’importantes fissures apparurent. La dégradation s’accentua.

La construction de la base aérienne de l’OTAN à Grostenquin (1950-52) nécessita l’acheminement d’un volume énorme de matériaux. Un trafic intense et continu se mit en place pendant une longue période, à travers le village vers Guessling en direction du site du Bischwald. Les vibrations engendrées par les lourds véhicules eurent un impact désastreux sur les murs, et le toit s’effondra. Il a fallu se résoudre à une démolition complète vers les années 1970 afin d’éviter d’éventuels accidents.

Grande croix du cimetière

Son histoire ne s’arrête pas là, elle continue sous une autre forme.

La famille Turck obtint un dédommagement au titre des dommages de guerre. La famille et les autorités ecclésiastiques, ne jugeant pas la reconstruction judicieuse, optèrent pour une autre solution. Ils proposèrent la construction d’une grande croix au bout de l’allée centrale du nouveau cimetière. Ce qui fut fait et la famille Turck en fit don à la commune. Ce don est confirmé par un compte-rendu du Conseil Municipal du 6 septembre 1969.

Ainsi s’achève l’histoire de la chapelle.

Crédit photos :        Anne Roch, Lucien Antoine, Paul Bastien.

Sources :                    N. Dorvaux, « Les anciens Pouillés du Diocèse de Metz », Nancy, 1902

                                      Archives Départementales de Metz

                                      Archives de l’église de Vahl-lès-Faulquemont

                                      Archives de la mairie de Vahl-lès-Faulquemont

                                      Cartes IGN,  cartes N. Naudin,  cartes Cassini.